En Français, « Kintsugi » se traduit par « jointure en or ». Il s'agit d'une pratique décorative visant à réparer la porcelaine ou la céramique d'une certaine manière. À l'aide de laque parsemée de poudre d'or, on recolle les morceaux ensemble.
Ce n'est pas du simple rabibochage. L'intérêt est de volontairement laisser apparentes les imperfections. Cette philosophie à part entière veut nous apprendre à accepter nos défauts. Elle veut même que nous les valorisions.
Tout d'abord, nous parlerons en détail de son histoire. Afin que vous soyez capable de vous y exercer si vous le désirez. Nous vous révélerons aussi les techniques de façonnage de ce savoir-faire. Nous finirons par vous montrer que cette pratique s'inscrit dans une sérieuse démarche philosophique.
Après avoir parcouru cet article, vous saurez tout à propos de ce noble art céramique.
Histoire du Kintsugi
C'est à la fin du 15 ème siècle que l'on doit la naissance de cette tradition. C'est le célèbre Shogun Ashikaga Yoshimasa qui en est à l'origine. Il est intéressant de noter que la vaisselle en porcelaine connaissait déjà une grande popularité au Japon. Ceci grâce à la cérémonie du thé. Malheureusement, les Japonais n'étaient pas compétents pour fabriquer ou entreprendre les réparations de l'objet en céramique. Ils devaient alors confier la tâche à leurs voisins chinois qui maîtrisaient le métier de céramiste.
Par maladresse, le courageux Général en chef des armées brisa son bol en faïence émaillée de prédilection. Il prit alors la décision de l'expédier en Chine, en espérant que l'on puisse lui offrir une seconde vie. C'est bien ce qu'il se passa, l'objet a pu renaître. Mais ce n'était pas suffisant pour satisfaire le général. Les vulgaires agrafes métalliques nuisaient fortement à son charme. Il exigea donc que l'esthétisme fasse partie du boulot des réparateurs.
Les artisans chinois se sont empressés de répondre à cette demande. Suite à de nombreuses expérimentations, la fameuse coutume eut finit par faire son apparition. Un petit peu plus tard, les Japonais finirent par s'approprier cette habileté. Aussi bien du point de vue de la maîtrise technique que de tout l'aspect conceptuel.Cet héritage est encore d'actualité de nos jours. Il n'est pas rare qu'un Japonais brise délibérément un vase afin de lui procurer une plus grande beauté. Un objet ayant bénéficié du traitement de la laque naturelle (appelée "urushi") possède une valeur bien plus importante.
Quelle est la technique Japonaise du Kintsugi ?
Il est important de savoir qu'il s'agit d'un art exigeant. Pour le manier aussi bien que les grands-maîtres, il vous faudra redoubler de patience et de dextérité. Concevoir une seule œuvre demande aux artistes au moins un mois entier. Pour mettre au point les plus grands chef d'œuvre, il arrive même qu'une année entière soit nécessaire.
Il est parfaitement possible de s'essayer d'en faire l'imitation. Vous pouvez façonner votre propre sculpture céramique, de façon plus modeste. Nous allons vous expliquer comment parvenir à cette manufacture en seulement quelques heures. (Si exercer le savoir-faire japonais vous plaît, vous allez adorer expérimenter l'art des fleurs vivantes)
Voici les 6 étapes de cette production de céramique :
1. Munissez-vous des prérequis
Voici les ustensiles et produits dont vous allez avoir besoin :
- Une vaisselle en céramique contemporaine brisée (assiette plate en porcelaine, bol, vase en porcelaine, carafe, dessous-de-plat ou mug...)
- Une bouteille de résine époxy bicomposée spécifique eux pièces en céramique fine et porcelaine dure.
- Plusieurs grammes de poudre d'or.
- Des pinceaux aux poils fins
- Des petites languettes en bois.
- Une assiette en plastique pour effectuer les mélanges.
- Des gants en latex pour éviter les mauvaises réactions chimiques sur votre peau (nous utiliserons des produits qui peuvent s'avérer dangereux).
2. Effectuez le mélange
Avant de commencer à mélanger, assurez-vous bien d'enfiler vos gants (vous n'êtes jamais à l'abri d'une réaction allergique). Dans l'assiette en plastique, disposez votre résine ainsi que votre poudre d'or. Munissez-vous de votre languette en bois puis touillez jusqu'à obtenir une pâte harmonieuse.
3. Appliquez la pâte sur les bords de votre vaisselle
Maintenant, enduisez le mélange sur les extrémités de votre œuvre. Inutile d'en appliquer beaucoup, colorer le relief suffit amplement. Une fois que cela est fait, laissez reposer pendant environ 2 minutes.
4. Soudez les morceaux
Désormais, il est temps de passer au collage. Pour cela, il suffit simplement de tenir vigoureusement les bords les uns contre les autres. Appuyez pendant le temps nécessaire à la fixation (en général, c'est l'affaire de quelques minutes). Pendant cette phase, essayez de bouger le moins possible. Cela pourrait compromettre la qualité de votre travail.
5. Lustrez la dorure
Maintenant, nous allons nous occuper des finitions. Équipez-vous de votre pinceau. Dessinez vos jointures à l'aide de la poudre d'or. Une fois terminé, vous pouvez vous débarrasser du surplus de poudre en soufflant dessus.
6. Laissez sécher
Pendant l'étape du séchage, veillez à ce que l'environnement soit sec et bien propre. Aucune poussière ne doit s'inviter dans la résine. (À l'époque, il pouvait arriver aux créateurs de monter sur un bateau et de prendre le large. Cela leur permettait de s'assurer qu'aucun déchet ne se trouvé dans l'air.) Bien sûr, vous n'avez pas besoin d'en faire autant. Occupez-vous simplement de placer le fruit de vos efforts en sécurité. Dans la plupart des cas, il faudra 1h pour que tout durcisse correctement. À la suite de quoi les rayures colorées de votre création céramique seront enfin finalisées. Votre décoration de table sera enfin prête à impressionner vos convives.
Une pratique philosophique
À travers cet artisanat se trouve un véritable message de vie. Il s'y cache une philosophie qui vise à nous accepter tel que nous sommes. Mieux encore, elle nous encourage à exhiber les imperfections que le temps nous fait subir. L'usure est une marque de beauté dont on peut être fier. Car c'est la conséquence de l'expérience de la vie. Ce qui s'apparente à des défauts devient de la sagesse. Cette croyance est dérivée d'une pensée japonaise qui fît son apparition un siècle plus tôt (14 ème) : le wabi-sabi.
De la même manière que l'objet Kintsugi, notre existence ne doit pas prendre fin sous le seul prétexte qu'elle subit des chocs. Au contraire, elle doit puiser de la force dans ses blessures. Cela renvoie à l'idée qu'être détruit n'est pas une fatalité. Cela permet de se reconstruire de façon plus solide et plus belle. Faire réparer un service en porcelaine qui est censé avoir rendu l'âme témoigne un certain goût pour la transcendance et l'éternité. Tout comme il ne fait jamais jeter ses objets en porcelaine à la poubelle, il ne faut jamais se laisser abattre.
Le Kintsugi fait aussi écho à un certain courant zen japonais : le « no mind ». Ce dernier consiste à accepter le changement. Car il fait partie intégrante de notre destin. Si un triste évènement advient, il ne pouvait pas en être autrement. Tout finit irrémédiablement par se détruire, l'obsolescence programmée est de ce monde. C'est alors inutile de dramatiser. Tout ce qui compte, c'est de se relever plus fort.
Une discipline complète et profonde
Comme nous avons pu le voir, cette méthode ancestrale s'inscrit autant dans les arts décoratifs que dans la sphère intellectuelle et spirituelle. Cela procure à ce domaine une profondeur passionnante. D'autant plus qu'une telle pratique est parfaitement cohérente au sein de la culture japonaise. On retrouve la même idée philosophique chez les samouraïs. Pour ces combattants, afficher les blessures est un fervent signe de gloire.
C'est assez vulgaire de résumer le Kintsugi à une simple technique pour réparer de la porcelaine, ou bien à une façon ingénieuse de décorer son service de table pour les grandes occasions. C'est évidemment bien plus que cela. C'est un art-de -vivre à part entière. Soigner l'objet en porcelaine grâce à ce procédé, cela revient à se soigner l'âme. L'urushi est doté d'une caractéristique étonnante : au fur et à mesure que le temps passe, elle ne fait que se renforcer. Ainsi, l'œuvre gagne en robustesse en même temps de prendre de l'âge. Là encore, la portée symbolique de ce décor est pleine de sens.
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Bonjour,
Je voudrais récupérer l’image du bol noir pour un projet universitaire. Qui est l’artiste, et quelle est la date de création de l’objet ?
Merci d’avance,
Marie
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